Écologie et zéro déchet

Conférence : Pierre Rabhi à Mouans-Sartoux (15 septembre 2016)

Le mois dernier, Pierre Rabhi est venu donner une conférence à Mouans-Sartoux sur le thème : « Sortir du mythe de la croissance indéfinie et nouvelle éthique de vie vers une sobriété heureuse ».

Cela faisait déjà deux fois que je le ratais, il était donc hors de question que ce soit encore le cas : ni une, ni deux, je décide de prendre mon jour de congé tout exprès ! ^^

Si vous ne le connaissez pas ou en avez seulement vaguement entendu parler, Pierre Rabhi est un paysan, écrivain et penseur français à l’origine de nombreux mouvements et de nombreuses structures écologiques. Il est d’ailleurs l’un des pionniers de l’agriculture écologique en France. Je vous invite à consulter un précédent article que j’avais écrit à son sujet pour en savoir plus.

Pierre Rabhi

Bref, le jour J, j’étais excitée comme une puce : j’allais enfin rencontrer Pierre Rabhi pour de vrai, et surtout l’écouter parler, en vrai.

Il est 18 heures passées de quelques minutes. Cela fait deux heures que je suis arrivée, en compagnie de mes collègues de co-voiturage avec qui j’ai eu le temps de bien faire connaissance. 😊 Pierre Rabhi arrive enfin, sous les applaudissements du public. Chemise toute simple et pantalon maintenu par des bretelles… fidèle à lui-même. Pas de costard-cravate pour l’occasion. 😉 Il prend place sur l’estrade, au côté de son interlocuteur.

Je vous retranscris ci-dessous les notes que j’ai prises pendant la conférence, qui en constituent ainsi un résumé (très) succinct, histoire de vous exposer les grandes lignes. Une conférence avec un Pierre Rabhi passionnant, tenant un discours clair, à la portée de tous, et plein d’humour.

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Pierre Rabhi commence par nous demander si nous sommes « déterminés » ou « déterminants »  : en étant des êtres déterminés, dans le sens de « fixes » , « immuables » , cela signifie que nous nous laissons aller à la fatalité, que nous ne pouvons rien changer. À l’inverse, si nous sommes déterminants, nous choisissons de construire nous-mêmes le monde que nous voulons. En gros, soit nous sommes passifs (déterminés), soit nous sommes actifs (déterminants).

Peu après, il confiera que l’humanité est folle, inintelligente. Cette dernière doit prendre conscience de son inconscience, car nous fonçons droit dans le mur, dit-il. Il faut ainsi revenir à une humanisation (chaque être humain doit reconnaître l’autre comme sa sœur ou son frère, et non pas comme un ennemi), et se tourner vers le partage des biens, etc., car cela permettrait de réguler les choses. Il nous fait d’ailleurs remarquer qu’à l’heure actuelle, avec le fonctionnement sociétale que nous connaissons, un enfant meurt toutes les 7 secondes dans le monde.

Est-ce que l’être humain peut changer pour que la société change ? C’est la question que se pose Pierre Rabhi…

Pierre Rabhi

Voyons-nous la planète comme un gisement de ressources qu’il faut épuiser pour du fric ?

Les problèmes d’inégalité semblent ressortir de cette conférence, car ils reviennent souvent sur le tapis : inégalité dans le partage des biens, comme dit précédemment, mais également au niveau des clivages Nord-Sud, Homme-Femme, etc. Pierre Rabhi prône l’égalité entre tous les êtres humains pour un monde meilleur. Il aimerait notamment que la position de la femme au sein de la société soit revalorisée, afin qu’elle se trouve exactement au même niveau que l’homme. Il explique que pour y parvenir, il faudrait déjà remanier la sémantique (« changer la sémantique pour changer les mentalités » , dit-il). À titre d’exemple, les Droits de l’Homme devrait être appelés les Droits de l’Humain.

Il a également été fait mention du revenu de base pour tous en France (revenu versé par une communauté politique à tous ses membres, sur une base individuelle, sans conditions de ressources ni obligation de travail). Pour Pierre Rabhi, ce revenu n’est pas une bonne idée. En effet, selon lui, il faut raisonner « humanité » et non « national » , et ce revenu ne peut pas être appliqué à l’humanité, car il est tout simplement impossible de payer 7 milliards d’humains ! De plus, Pierre Rabhi insiste sur le fait qu’il est important que chaque être humain soit acteur de sa vie. (Pour ma part, je suis mitigée sur la question… du revenu de base, pas sur le fait que l’on doit être acteur de sa vie, hein ! ^^ Je pense que l’un n’empêche pas l’autre… Mais pour le transposer à l’échelle mondiale, ça c’est une autre histoire, c’est sûr !)

Autre point abordé, concernant la société de consommation/production dans laquelle nous vivons : il explique que 40 % de la production (mondiale ?) est superflue… et donc jetée ! Je trouve personnellement cela scandaleux, non seulement d’un point de vue écologique bien sûr, mais aussi, comme Pierre Rabhi le dit si bien, parce que « certains n’ont même pas l’indispensable alors que d’autres ont plus que le superflu » . On en revient donc à nouveau à l’idée du partage des biens, des richesses, mentionnée plus haut.

Vivre, c’est tout simplement jouir de la fraternité, de la beauté, des échanges avec les autres… ce n’est pas contribuer au PNB d’un pays.

Pour changer de société, ce n’est qu’une question de motivation. Aucun trust (Monsanto, Bayer… vous savez, les grands manitous tout puissants ?) ne peut exercer sa puissance si les citoyens le refusent, décident de s’y opposer, en s’unissant et en organisant des stratégies de boycott… Mais encore faut-il le faire, ajoute Pierre Rabhi ! C’est en effet là peut-être le plus dur : motiver les troupes. À agir avant qu’il ne soit trop tard pour que nos enfants et petits-enfants n’héritent pas d’un monde impossible à vivre. Si l’on ne réagit pas rapidement, maintenant, l’humanité se suicide, insiste-t-il. Nous devons nous orienter vers une décroissance, une baisse de la consommation, revenir à un mode de vie plus sobre et naturel.

La conférence se terminera toutefois par une note positive et poétique : une petite fille pose la question « Ça sert à quoi l’amour ? » , ce à quoi Pierre Rabhi répondra que l’amour sert au bonheur… mais aussi à faire des enfants. 😉

Pierre Rabhi

Petite anecdote : Pierre Rabhi et né musulman, en Algérie. Sa mère décède lorsqu’il a 4 ans et son père le confiera peu après à un couple de Français chrétiens. Il se convertira alors au christianisme. Il explique être ainsi un mélange de deux cultures, deux religions, avec des traditions différentes (d’où son ouverture d’esprit, je pense) et plaisante sur le fait qu’il est passé, sans transition, du « Surtout ne mange pas de porc et ne bois pas d’alcool ! » , aux repas où l’on se régale de saucisson et de vin. 😉

Et vous, avez-vous déjà eu la chance d’assister à l’une de ces conférences ? Que pensez-vous de sa façon de voir les choses ?